Mon enfant ne veut pas manger
L’alimentation est une des préoccupation les plus importantes (avec le sommeil, vous êtes d’accord ?) pour tous les parents.
Les « perturbations » de l’alimentation peuvent arriver à tous les âges, dans tous les contextes familiaux et quelque soit le type d’alimentation. Ne vous sentez pas coupable, vous n’y êtes pour rien ! Par contre, votre rôle est d’accompagner votre enfant, vers une autonomie face à l’alimentation, et pour le coup l’autonomie vers une alimentation saine, c’est ce qui est l’idéal pour tous.
Le rôle de la société dans l’alimentation de l’enfant
Dès le début de la vie in utero, l’humain est analysé sous toutes ses formes (poids, taille etc…) et très rapidement après la naissance, le sujet de l’alimentation entre en jeu.
Allaitement ou biberon, ce n’est pas tant le contenant qui est surveillé (bien qu’on pourrait développé cette partie très largement), c’est le nombre de « repas », la quantité, la durée. Absolument toute l’alimentation du nourrisson est déjà surveillé.
Qu’est ce qui se passe alors dans la tête des parents ? Ils doivent se positionner, dès le début, comme garant de la bonne prise des repas, ils sont conditionnés par la société à contrôler tout ce qui est ingéré par leurs enfants.
Attention, je ne dis pas qu’il n’y a pas de règles à suivre, ou qu’il ne faut pas être vigilant. Je ne dis simplement, qu’on positionne trop souvent le parent comme dictateur des repas, alors que de nombreuses études aujourd’hui, montrent qu’un nourrisson sait de lui même à quel moment il a faim, ce qu’il a besoin de manger, de quelle manière et en combien de temps.
Michael Pollan, auteur du Manifeste pour réhabiliter les vrais aliments, a dit : « Durant pratiquement toute l’histoire de l’humanité, cette question a été résolue sans l’avis de spécialistes. Dans toutes les cultures, la mère était reconnue compétente en ce qui concernait la nourriture. Que manger, en quelle quantité, dans quel ordre, avec quoi, quand et avec qui étaient, jusque-là, des questions dont les réponses allaient de soi et que l’on se transmettait de génération en génération sans beaucoup d’histoires ou de controverses. Cependant, ces dernières décennies, la mère a perdu une grande part de son autorité sur la composition des menus, la cédant aux scientifiques et aux experts en marketing agroalimentaire (souvent même à une alliance malsaine des deux) et, à un degré moindre, au gouvernement avec ses recommandations nutritionnelles, ses règles d’étiquetage sans cesse fluctuantes et ses pyramides alimentaires déroutantes. »
Je sais que les recommandations rassurent, elles guident, parce que parfois on se sent seul et désemparé face au flow d’information que l’on reçoit de toute part. Mais le corps est programmé pour savoir ce dont il a besoin, a quel moment et en quelle quantité.
S’il n’y a pas de pathologie particulière, de problème physiologique ou psychologique, il n’y a aucune raison que votre enfant ne mange pas correctement s’il a tout ce qu’il lui faut à sa disposition.
Un enfant qui ne mange pas : c’est quoi ?
Il y a autant de problématique face à l’alimentation que de parents et d’enfants.
Selon le vécu, les croyances, les valeurs, les règles de vie de chacun : « mon enfant ne mange pas », ne signifie pas la même chose. Généralement, ce n’est pas une question de ne RIEN manger, c’est très rare qu’un enfant ne mange absolument rien, sans pathologie particulière.
Dans ces moments là, l’inquiétude est plutôt que l’enfant ne mange pas assez, pas de la manière attendue, pas « ce qu’il devrait manger », pas de légumes, pas de fruits…
A partir de là, il est important de se poser quelques questions :
soucis de croissance, cassure dans la courbe de poids, difficultés importantes à s’alimenter : quelques soient les aliments proposés, douleurs importantes lors de n’importe quelle étape de l’alimentation…Dans ce cas là, il est important de prendre contact avec un professionnel de santé formé.
Mon enfant ne veut plus manger de légumes
Une problématique qui revient souvent chez les enfants entre 2 et 5 ans.
« Mon enfant a toujours bien mangé, il a toujours mangé de tout, mais aujourd’hui il ne veut plus manger de légumes »
Si c’est une problématique à laquelle vous êtes confrontés, vous avez surement beaucoup d’interrogations, et je comprends votre inquiétude.
A partir d’un certain âge les enfants modifient leur rapport à l’alimentation et c’est une période normale dans le développement humain. A certaines périodes le bambin va vouloir manger exclusivement certains aliments (très souvent des pâtes, avec parfois de la viande…), c’est ce qu’on appelle la néophobie alimentaire.
Il peut y avoir plusieurs raisons à ce phénomène assez fréquent :
- un dégout organoleptique (qui affecte les organes des sens), ou bien un sens en particulier
- un rejet cognitif lié à l’image que l’enfant a de l’aliment en question
- un rejet lié à un évènement passé
- une sensibilité particulière à un aliment, à un contexte ou à un évènement particulier
- le goût amer de la plupart des légumes
Il existe des risques pour la santé de l’enfant à ne pas manger de légumes ou bien de fruits (des problèmes de transit, des carences en vitamines et minéraux par exemple) mais les risques apparaissent généralement après une longue période sans aucune prise de fruits ou légumes.
Il existe forcément un risque dans certaines situations, mais le risque dépend surtout du mode de consommation.
Un enfant qui mange des fruits ou des légumes en compote, en purée (mélangé ou non avec des féculents), il mange des fruits / légumes. Si c’est passager et que vous ne voyez pas apparaitre de troubles du transit, ne vous alarmez pas trop vite. Mais si ça vous inquiète, n’hésitez pas à consulter un médecin formé et bienveillant.
La faim : un repère indispensable
L’accompagnement respectueux de l’enfant a pour but de l’aider et de lui permettre de créer son propre référentiel interne : la faim en fait parti.
La faim se repère par des signaux particuliers et propres à chaque individu : gargouillis, sensation de ventre vide, une sensation de fatigue, une grande irritabilité, des crampes d’estomac…
L’idée est d’accompagner l’enfant à repérer les sensations de son corps autour de la faim. En les questionnant et en les guidant, les enfants se sentent écoutés, respectés et compris.
Les enfants qui ont des repères fiables, qui mangent quand ils ont faim, qui écoutent leur corps, savent naturellement réguler leur appétit et s’arrêter de manger quand ils n’ont plus faim, ou demander à manger quand ils ont faim.
L’enfant sait naturellement remplir son besoin de s’alimenter, sauf s’il y a un soucis au niveau de son métabolisme et à ce moment là, une prise en charge particulière et par un professionnel de santé est nécessaire.
Et si c’était physiologique ?
Il y a des périodes dans la vie d’un enfant où la faim est différente :
- en cas de poussée dentaire
- en cas d’acquisition (acquisition motrice, acquisition du langage …)
- en cas de maladie
Si les changements dans l’alimentation de votre enfant ne s’éternise pas (pas plus de quelques jours), qu’il n’y a pas de cassure dans la courbe de poids, ne vous alarmez pas tout de suite !
Un changement dans l’alimentation de votre enfant peut être lié à des facteurs divers et variés, c’est pourquoi il peut être important de consulter si la situation est vraiment préoccupante.
- Une intolérance / une allergie alimentaire
- Un changement émotionnel important
- Un changement dans ses goûts alimentaires
Attention aux stratégies pour faire manger
La plupart des troubles liés à l’alimentation une fois adulte trouvent leurs prémisses dans l’enfance.
Pourquoi ? Je vous explique ça rapidement.
Aujourd’hui, on le sait, vous le savez surement, l’enfance et les premières années d’un enfant sont le socle de toute une vie. L’adulte se construit et construit ses référentiels selon la manière dont il a été accompagné enfant.
Le corps est programmé pour répondre à ses besoins alimentaires, dès la naissance et même avant. Pendant des siècles, voir des millénaires, il n’a jamais été question de dire aux uns et aux autres comment s’alimenter, le corps sait faire. Votre enfant sait faire, si on lui en laisse la possibilité !
Très souvent, trop souvent, vous entendrez ou vous lirez des astuces pour faire manger un enfant, pour réussir à faire avaler […]. Attention, à ne pas tomber dans les VEO (violences éducatives ordinaires). Ce sont elles qui créent le plus souvent des troubles liés à l’alimentation. Les émotions sont la base de tous les comportements.
Les violences éducatives ordinaires dans l’alimentation
Les violences éducatives ordinaires sont partout dans la vie de nos enfants. Trop souvent banalisées, elles ont pourtant un impact considérable sur leur développement, comme en témoigne l’observatoire des violences éducatives ordinaires.
Il existe plusieurs types de violence éducative ordinaire face à l’alimentation d’un enfant, je vous propose ici une liste non exhaustive pour vous donner une petite idée :
- forcer à manger quoi que ce soit
- forcer à finir son assiette
- insister pour gouter un plat ou un aliment
- faire du chantage pour ingérer un plat ou un aliment
Il existe tout un panel de phrases utilisés par les parents (parfois sans en avoir vraiment conscience) ou par les professionnels qui s’occupent des enfants (selon les modes de gardes, dans les centres aérés ou cantines scolaires…) qui ont de réelles répercussions sur les enfants et leur rapport à l’alimentation.
Je propose dans mes accompagnements de passer en revue, ces phrases que vous pourriez vous même avoir intégré comme « normales » et même légitimes, pour vous aider à prendre conscience de l’impact qu’elles ont sur vos enfants.
Je sais que c’est parfois déroutant , que ça angoisse et que ça peut faire peur. Parfois les enfants vont faire des « expériences » pour mieux se rendre compte des limites de leur corps : manger des quantités que vous jugerez trop importantes, ou à l’inverse des quantités que vous jugerez pas assez importantes. Et face à ça, vous avez deux solutions : choisir de vous positionner comme l’adulte qui décide, celui qui interdit ou qui limite (vous vous placez délibérément dans une position adultiste) ou bien vous décidez d’accompagner votre enfant pour qu’il se crée son propre référentiel interne.
Comment faire pour donner envie aux enfants de bien s’alimenter ?
C’est une question qui fait partie intégrante du programme d’accompagnement MINO que je propose, c’est pour moi essentiel d’avoir des outils pour aider les enfants sur ce chemin de création.
Je vous partage ici quelques idées qui, j’espère pourront vous aider :
- Faire des repas des moments agréables : pas une obligation, pas une contrainte mais un moment de partage et de bonne humeur
- Faire participer autant que possible les enfants à l’alimentation : préparation des menus, temps de courses, préparation des repas, service et quotidien autour des repas : mettre la table, débarrasser, nettoyer
- Faire en sorte de rendre les aliments attrayants : les aliments nouveaux ou moins intéressants peuvent être mis en scène
- Faire le point sur vos valeurs et ce que vous avez envie de transmettre à vos enfants, et surtout de quelle manière vous pensez qu’il est judicieux de le faire
- Faire en sorte que les sensations de faim soient respectées, le plus possible en adaptant les horaires des repas